A l’occasion du salon SANTEXPO 2022, my SIH magazine a eu l’opportunité de rencontrer M. Jean-Baptiste FRANCESCHINI, Co-fondateur du Groupe de Softway Medical pour un échange relatif à l’évolution du positionnement stratégique de l’un des leaders de la e-santé en France…

Jean-Baptiste Franceschini a été nommé Directeur commercial de la société Waid en 2002. Il a ensuite été chargé de la Direction des ventes & marketing de Softway Medical en 2006, couvrant ainsi les domaines de la radiologie et des Systèmes d’Information Hospitalier et clinique. En charge de la division Imaging depuis 2012, il est à présent directeur du service marketing et de communication, également en charge du développement à l’international.

my SIH magazine :: Le paysage des acteurs de la e-santé connait de profonds bouleversements, notamment dans le cadre de diverses opérations de croissance externe. Comment Softway Medical aborde cette nouvelle orientation ?

Jean-Baptiste FRANCESCHINI (JBF) : Effectivement, le secteur connaît une certaine effervescence et les regroupements d’enseigne s’accélèrent. Cela étant, l’approche de SOFTWAY MEDICAL se distingue de celle d’autres acteurs du marché. Nous ne sommes pas dans une logique de rachats successifs de société concurrentes, mais plutôt dans la continuité d’évolution de notre socle applicatif historique, Hôpital Manager. Il faut imaginer une trajectoire d’un cœur applicatif qui avance au rythme des évolutions relatives aux domaines fonctionnels, technologiques et légaux ; par opposition à une stratégie de lignes applicatives venant « s’empiler » les unes aux autres. Cette stratégie se traduit notamment dans notre forte volonté de maîtrise de la « conception » technique et fonctionnelle de nos produits.

my SIH magazine :: Comment se traduit concrètement cette stratégie pour vos clients ?

JBF : Côté clients et utilisateurs cette stratégie rassure. Elle met en évidence notre souci permanent d’homogénéité. Certes, le projet industriel est plus ambitieux mais il fait partie de notre ADN : la conception et la R&D. Il faut évidemment engager d’importants moyens pour accompagner cette stratégie. Ce n’est pas un hasard si, aujourd’hui, notre équipe est constituée de 300 développeurs : la plus importante équipe basée en France aux commandes d’une application qui peut prétendre apporter une véritable réponse en terme d’ERP de Santé. Un autre point qui caractérise notre stratégie, c’est notre spécificité « France » et, dans le microcosme des acteurs e-santé, nous revendiquons la position de leader, de « numéro un français ». La cohérence technique de notre stratégie produit rassure nos clients. En outre, au-delà de l’homogénéité applicative, notamment en ce qui concerne l’interface utilisateur, notre approche amène progressivement les clients à une réflexion sur le basculement du mode « local » au mode « hébergé » ; sans perdre quoi que ce soit en termes de repères et d’environnement. Il faut aussi pouvoir compter sur un acteur disposant de fortes capacités d’investissement pour développer de nouveaux modules et applications. Softway Medical a progressivement évolué des domaines GAP, GEF vers le DPI en investissant massivement dans le médical : prescription du médicament, gestion des blocs opératoires, organisation des urgences, maternité, etc.

my SIH magazine :: Quels sont les derniers secteurs investis par Softway Medical ?

JBF : Nous avons récemment annoncé notre volonté de répondre aux attentes des grands ensembles hospitaliers, qu’il s’agisse de CHU ou de grands GHT avec un projet de 10 millions d’euros sur trois ans pour couvrir notamment la recherche ; secteur mal couvert de l’aveu même des utilisateurs. Notre programme couvre les approches innovantes comme l’intégration de l’intelligence artificielle. Sur la base d’applications métier et de partenariats stratégiques nous serons en capacité de proposer des modules complémentaires à notre offre. Nous ne serons pas en mesure de répondre à tout mais notre capacité de « fédération » et d’interopérabilité favorise la construction d’un écosystème capable d’apporter les bonnes solutions au client final.

my SIH magazine :: Quelques mots sur votre nouvelle implantation en accompagnement de votre croissance ?

JBF : Historiquement, nous étions basés à cinq minutes d’Aix-En-Provence avec 3000 m² de locaux depuis une dizaine d’années. Au regard de notre croissance, il devenait urgent d’évoluer. En effet, nous avons embauché 150 personnes par an ces deux dernières années et pour l’année 2022, 200 postes ont été ouverts. Nous avons donc passé la barre des 800 collaborateurs et nous franchirons, dans les 18 mois qui viennent, la barre du millier de collaborateurs. Il faut rappeler qu’au lancement de notre projet en 2006, notre équipe était constituée de moins de 200 collaborateurs. Nous avons donc lancé, il y a deux ans, la construction de nouveaux locaux à Fuveau en doublant notre surface actuelle. Aujourd’hui, nous disposons de 6000 m² avec beaucoup de modernité et de nouveautés en matière de confort du travail, de modèles de coworking et de travail collaboratif. Les collaborateurs sont unanimes : le confort est exceptionnel.

my SIH magazine :: Faut-il voir à terme une stratégie de « centralisation » autour de votre implantation aixoise ?

JBF : Non, pas exactement ! Parallèlement à notre évolution au niveau du siège, il y a aussi la réalité de nos filiales. Notre stratégie est basée sur le respect des équipes et une approche humaine qui est de ne pas déraciner les gens sous prétexte du rachat d’une société. Nous mettons un point d’honneur à conserver l’attache historique des sociétés qui intègrent notre groupe. La composante « humaine » est primordiale et le souci de conserver des compétences passe par la prise en compte de la réalité de vie de nos collaborateurs parfois ancrés depuis des années dans une région. En conséquence, Softway Medical dispose de présences plus ou moins significatives à Lyon, Grenoble, Bordeaux, La Rochelle, Niort, Nantes, Caen, Troyes et, bien évidemment, Paris. À Paris, à la suite du rachat de Nicesoft (éditeur de Logiciels en Imagerie Médicale), nous étions aussi confrontés à un problème de place. De ce fait, nous avons profité d’une opportunité qui nous a semblé très intéressante au travers du « Paris Santé Campus » ; l’initiative gouvernementale de regroupement, dans un même lieu d’institutionnels, de startups et de sociétés matures dans le domaine de la e-santé. Cette initiative présente pour nous l’occasion de renforcer notre capacité de rayonnement national, mais aussi international. L’occasion était trop belle et on ne pouvait pas – en tant que leader français dans notre domaine – ne pas faire partie de cette aventure ! C’est donc avec grand plaisir que nos équipes investissent ces lieux tout en sachant par ailleurs que notre siège social reste du côté d’Aix-en-Provence. Sur « Paris Santé Campus », nous faisons le pari de la genèse d’un écosystème e-santé français à la pointe de l’innovation. Pour les uns et les autres, il y a beaucoup de choses à aller chercher en termes d’interaction et de représentativité. Ce campus bénéficie d’une très belle visibilité et nous nous devons de faire partie des porte-drapeaux du savoir-faire e-santé français.

my SIH magazine :: Cette nouvelle implantation est-elle en rapport avec le Ségur ?

JBF : Le Ségur est une figure imposée et non une figure libre comme on a tendance à les affectionner ! En revanche, l’approche répond parfaitement aux nécessités d’évolution des systèmes d’information de Santé en France. Il est temps de passer un cap dans la capacité, mais aussi dans la volonté, des différentes parties prenantes de s’accorder sur le partage de processus et de protocoles communs. Il y avait clairement sur ce point un plafond de verre que l’on n’arrivait pas à franchir. Le Ségur a le mérite de structurer une dynamique en proposant en parallèle des financements à hauteur des objectifs. C’est aussi une façon d’imposer un même tempo aux industriels, tutelles, organismes gouvernementaux et autres parties prenantes. La barre à franchir est haute et mobilise des moyens colossaux de la part des éditeurs avec un calendrier très structurant. Mais in fine, cela sera vraiment bénéfique : nous allons pouvoir rattraper notre retard, non seulement par rapport à d’autres pays, mais surtout vis-à-vis du champ des possibles qu’offrent les technologies modernes et qui contribuent à un partage rapide et sécurisé de l’information. Il est possible de gagner du temps dans le diagnostic et dans la prise en charge pour être en capacité d’apporter plus de valeur ajouté aux informations clés, et les partager en s’affranchissant des distances et du temps.

my SIH magazine :: Dans vos propos la revendication « France » est forte, que faut-il en déduire en ce qui concerne votre stratégie internationale ?

JBF : Notre position en France nous met à présent en situation de faire valoir à l’international avec un ensemble d’acquis, sur les technologies, l’hébergement, la sécurité, les modèles de fabrication, les modèles de services et les modèles de consommation d’information. Nous sommes aux prémices de cette ouverture et, bien qu’une expérience réussie au Canada soit en train de se développer, toute opportunité est à l’étude. Il s’agit bien sûr d’évaluer le champ des possibles, les besoins et les forces en présence pour établir les priorités. Nous sommes attentifs au marché européen, mais pas seulement.

my SIH magazine :: Quels sont vos prochains défis à court terme ?

JBF : Il y a encore de très belles choses à faire sur le marché français. Dans le médical, les perspectives sont bonnes avec, notamment, la redistribution des cartes provoquée par les GHT. En réponse à une croissance soutenue, nous avons créé la Softway Medical Academy afin de former toutes les personnes que l’on recrute. Cette démarche est essentielle pour répondre qualitativement aux exigences des clients. Au niveau du groupe, notre fil rouge est de continuer à faire de la croissance externe pour couvrir des domaines qui nous permettent de mieux mailler le territoire de santé. C’est dans cette logique que nous sommes sortis des murs de l’hôpital pour nous intéresser à la ville : maisons de santé, centres de santé, spécialistes et généralistes. Les différentes briques posées au travers de nos rachats, nous permettent justement de répondre à ce besoin de territorialisation. Nous continuerons à court terme dans cette voie mais toujours avec une approche d’intégration technologique forte à notre socle.

my SIH magazine :: Pour conclure, quelques mots pour ce salon SANTEXPO 2022 ?

JBF : L’attente était forte, quantitativement, et surtout, qualitativement. Aujourd’hui, à la moitié du salon, nous sommes très satisfaits : la fréquentation est au rendez-vous avec des rencontres de prospects, de partenaires et d’institutionnels. Par ailleurs, concernant nos clients, les pré-réservations de rendez-vous étaient remplies bien avant l’événement. Il était temps que le salon SANTEXPO reprenne des couleurs car dans les précédents salons, l’effet « COVID » était encore trop présent et nous étions tout de même en stress, eut égard, notamment, à nos investissements. Nous constatons que, comme nous, d’autres acteurs ont fait d’importants investissements sur les stands : un signal qui conforte bien l’idée d’un marché où il reste encore de belles perspectives.